Sais-tu ce qu’il y a dans ton assiette?

Du cheval dans ton hamburger?

En 2013, un énorme scandale de fraude alimentaire à la viande de cheval a éclaté en Europe. En tout, 500 tonnes de viande de cheval ont été vendues sous forme de plats congelés. Un autre 200 tonnes a servi dans des saucisses de « bœuf » vendues dans plus d’une dizaine de pays en Europe. 

Le problème a d’abord été détecté en Irlande. L’Irlande était alors le seul pays d’Europe à tester la présence de cheval dans les produits de viande. Des entreprises en France, en Chypre, aux Pays-Bas et en Roumanie étaient impliquées dans la fraude.

Manger du cheval n’est pas nécessairement mauvais en soi. Les scientifiques ont découvert peu de risques pour la santé associés à la consommation de viande de cheval. Mais là n’est pas la question. La plupart des gens veulent savoir ce qu’ils mangent. Ils veulent avoir l’assurance que l’information sur l’étiquette est exacte. En plus, pour bon nombre de gens, l’idée de manger du cheval est assez dégoutante!

Qu’est-ce que la fraude alimentaire?

Ce cas est un exemple de fraude alimentaire. Remplacer le bœuf par la viande de cheval est un type de fraude alimentaire appelé substitution. On remplace le produit par autre chose. Habituellement, l’ingrédient utilisé pour la substitution est de qualité inférieure et coûte moins cher. La viande de cheval est meilleur marché que le bœuf. En remplaçant le bœuf par la viande de cheval, les entreprises font plus d’argent.

La substitution n’est qu’un type de fraude alimentaire. La falsification est un autre type de fraude. Dans ce cas, un produit est mélangé avec d’autres éléments, mais il est vendu comme étant un produit pur. Par exemple, un fabricant pourrait ajouter de l’huile de canola à de l’huile d’olive, mais prétendre qu’il s’agit d’huile d’olive pure. Ce procédé est aussi appelé dilution.

Faire des déclarations fausses ou trompeuses à l’égard d’un produit est une autre forme de fraude alimentaire. Par exemple, dire qu’un aliment ou un ingrédient rend plus intelligent serait trompeur.

L’étiquetage trompeur est une autre forme courante de fraude alimentaire. Un fabricant pourrait présenter de façon trompeuse le produit ou sa provenance. Par exemple, étiqueter du tilapia, un poisson bon marché, comme étant du vivaneau rouge, qui est plus coûteux, est une présentation trompeuse. Cela va aussi pour les fruits et légumes étiquetés comme étant biologiques alors qu’ils ne sont pas certifiés. 

Qu’est-ce que le code-barres génétique?

Les scientifiques utilisent fréquemment le code-barres génétique pour identifier les espèces inconnues dans les produits à base de viande mal étiquetés. Cette technique a été mise au point en 2003 par Paul Hebert de l’Université de Guelph ici même au Canada.

Le code-barres génétique consiste à prélever de petits échantillons de viande et à effectuer le séquençage d’un segment d’ADN mitochondrial provenant d’un gène spécifique de l’ADN d’une espèce. Pour les espèces animales, il s’agit du gène cytochrome oxydase I (COI ou COX1). La séquence de ce gène permet d’identifier avec exactitude une espèce, comme un cheval ou une vache. 

Le code-barres génétique est devenu un outil important de la taxonomie, ou classification biologique. Les scientifiques utilisent le code-barres génétique ainsi que les observations des spécimens physiques des animaux ou des plantes pour effectuer la classification d’une espèce. Il aide aussi les taxonomistes à distinguer les espèces les unes des autres. Tout cela parce que chaque espèce possède un code-barres génétique unique. Le code-barres peut révéler une différence au niveau de l’ADN pour deux espèces qui semblent identiques. Le code-barres peut même être établi à partir d’un tout petit échantillon d’un animal ou d’une plante pour en identifier l’espèce. Les scientifiques peuvent établir le code-barres d’une aile, d’un morceau de peau ou d’une feuille!

As-tu déjà vu un mélange de viande hachée? Il est impossible de différencier les types de viande par simple observation. Par contre, le code-barres génétique peut établir avec exactitude les espèces contenues dans le mélange.

En 2013, au moment du scandale de fraude alimentaire, la Food Safety Authority of Ireland (FSAI) a analysé par code-barres génétique les lasagnes d’une entreprise. Ils ont découvert que certains produits contenaient entre 60 % et 100 % de viande de cheval! La FSAI a déclaré que la substitution de viande était le résultat d’une fraude délibérée. La fraude est une activité criminelle.

Le savais-tu?

Par suite du scandale de la viande de cheval en Europe, une unité nationale chargée des crimes alimentaires, la National Food Crimes Unit (NFCU), a été mise sur pied au Royaume-Uni en 2015.

Les Canadiens devaient-ils s’inquiéter du contenu des produits de viande achetés au Canada? Heureusement, non. Le Canadian Centre for DNA Barcoding (CCDB) de l’Université de Guelph, a réagi rapidement. Dès qu’ils ont appris le scandale, les chercheurs du Centre ont testé des hamburgers de 15 sources différentes. Aucun d’eux ne contenait de la viande de cheval. Tout comme l’indiquait l’étiquette, ils étaient faits à 100 % bœuf! Ce fut une bonne nouvelle pour les consommateurs canadiens!

Quelles sont les répercussions sociales de la fraude alimentaire?

Quelles sont les répercussions d’un scandale de fraude alimentaire de cette envergure? Eh bien, il a fallu beaucoup de gens, beaucoup de temps, beaucoup d’argent et beaucoup de travail pour cerner le problème. Les compagnies qui vendaient des produits mal étiquetés ont dû faire un vaste rappel d’aliments. Plus de 200 millions de burgers ont fait l’objet d’un rappel, de même que la plupart des lasagnes vendues en Europe. Certaines sociétés de transformation alimentaire et de distribution de viande ont aussi perdu beaucoup d’argent.

Cette affaire a débouché sur une longue enquête criminelle visant les personnes impliquées dans la fraude. Bon nombre d’entre eux se sont retrouvés devant les tribunaux. Un homme a été poursuivi en 2015. Et en 2019, quatre autres hommes ont finalement été accusés et condamnés à des amendes et à des peines d’emprisonnement. 

Le savais-tu?

Selon les estimations, les crimes alimentaires coûtent entre 10 et 50 milliards de dollars à l’industrie alimentaire mondiale chaque année.

Lorsqu’un aussi gros scandale de fraude alimentaire se produit, les gouvernements ont un rôle à jouer. Les organismes gouvernementaux chargés de la salubrité et de l’inspection des aliments de chaque pays ont dû examiner de près la situation. Il a fallu déterminer comment les politiques et les procédures en place ont pu mener à une telle contamination de la chaîne d’approvisionnement alimentaire. Les agences responsables de l’importation et de l’exportation des aliments entre les pays ont aussi dû se pencher sur la question.

Mais les cas de fraude alimentaire de cette taille posent un autre problème. Ils provoquent une perte de confiance des consommateurs, comme toi et moi, envers les fournisseurs d’aliments. Au moment du scandale de 2013, un grand nombre de personnes ont perdu de l’argent en achetant un produit alimentaire dont ils ne voulaient pas. Ils ont gaspillé de la nourriture lorsqu’ils ont dû jeter ou retourner le produit. Ils ont même peut-être eu l’impression d’avoir été bernés par les fabricants de produits alimentaires. Certaines personnes ont peut-être même cessé complètement de manger de la viande!

Aujourd’hui, les gens considèrent le scandale de la viande à cheval comme un tournant décisif dans l’histoire des fraudes alimentaires; illustrant à quel point l’alimentation est particulièrement vulnérable à un crime grave et de grande ampleur à l’échelle internationale.