Biocarburant algal: alimenter la planète avec l’écume d’étang

Les algues pourraient être de super productrices de biodiésel efficaces. Mais peut-être pas si efficaces... Car c’est l’huile des algues qui en fait une formidable matière première potentielle pour le biocarburant. La matière première est une matière utilisée pour la production de biocarburants. Le biodiésel est un important type de biocarburants.

Le biodiésel peut être utilisé en remplacement du carburant diésel à base de pétrole. Il peut aussi être mélangé à ce dernier. Le biodiésel fabriqué à partir de l’huile des algues est un biocarburant dit de troisième génération. À l’heure actuelle, seulement quelques raffineries en produisent. Mais il pourrait devenir un jour une source majeure de biocarburants.

Algues 101

Les algues appartiennent à un groupe d’organismes photosynthétiques distincts des plantes. Elles produisent des sucres et de l’oxygène à partir de l’eau, du dioxyde de carbone (CO₂) et de l’énergie solaire. Certaines algues, comme les algues marines, sont de grande taille et multicellulaires. Mais beaucoup sont microscopiques et unicellulaires, comme les microalgues vertes utilisées pour la production de biodiésel. Les cellules des algues vertes métabolisent en huile les sucres qu’elles produisent. C’est un moyen d’emmagasiner de l’énergie. 

Le savais-tu?

Les algues vertes peuvent croître très rapidement. Chez certaines espèces, la quantité d’huile emmagasinée peut représenter plus de la moitié de leur masse!

Comment le biodiésel est fabriqué à partir des algues

Les matières grasses végétales et animales, incluant l’huile dans les algues, sont constituées de molécules organiques appelées triglycérides.

La première étape dans la fabrication de biodiésel consiste à extraire des algues l’huile contenant les triglycérides. L’extraction peut se faire de deux manières. Une des techniques est le broyage mécanique des algues, comme si tu pressais des olives pour fabriquer de l’huile d’olive. L’autre est l’utilisation d’un solvant organique qui est mélangé aux algues.

Ensuite, les triglycérides sont convertis en esters méthyliques d’acide gras (EMAG). Ceux-ci sont produits par une réaction de transestérification. Le même processus peut être utilisé pour dériver des EMAG à partir de l’huile de canola ou des huiles de cuisson usées.

Comme les cultures de matière première pour biodiésel telles que le canola, les algues peuvent être cultivées. Les mêmes exigences s’appliquent à la culture des algues que pour les algues vertes qui croissent dans les étangs, les piscines et les aquariums. Pour leur croissance, elles ont besoin d’eau, de lumière solaire, de CO₂ et de nutriments comme l’azote et le phosphore.

Il existe deux principales façons de cultiver des algues:

• dans des étangs extérieurs;
• dans des bioréacteurs fermés.

Les étangs (ou bassins) extérieurs ressemblent à de grandes piscines. Ils comportent un système qui maintient l’eau en mouvement pour faire circuler les algues. Ainsi, toutes les algues bénéficient de la même exposition à la lumière du soleil. 

L’utilisation d’étangs ouverts présente certains désavantages. L’eau peut s’évaporer rapidement parce qu’ils s’étendent sur de grandes surfaces. Ils comportent aussi un risque de contamination par d’autres espèces d’algues.

Les bioréacteurs fermés sont des environnements intérieurs étanches dans lesquels les algues peuvent croître. Ils présentent une variété de formes et de styles. L’avantage de cette option est que les humains peuvent soigneusement contrôler les conditions de croissance. Mais leur construction et leur entretien sont beaucoup plus coûteux que pour les étangs ouverts.

Quels sont les avantages de l’utilisation des algues pour produire du biodiésel?

L’utilisation des algues comme matière première pour la production de biodiésel présente plusieurs avantages comparativement à la culture du canola comme matière première. Ces avantages sont les suivants:

1. Sur une petite surface, les algues produisent plus d’huile que certaines autres cultures. Les scientifiques n'ont pas déterminé précisément dans quelle proportion. Mais ce pourrait être de deux à dix fois plus.
2. Les algues ne nécessitent pas de terres agricoles. Cela signifie qu’elles ne font pas concurrence aux plantes cultivées pour des terres agricoles de bonne qualité.
3. Les algues pourraient contribuer à réduire la pollution de l’air. Les algues ont besoin de grandes quantités de CO₂ pour la photosynthèse. Une partie de ce CO₂ pourrait provenir de sources comme les émissions industrielles.
4. Les algues ont besoin d’eau, mais il n’est pas nécessaire que l’eau soit propre. Un projet de recherche mené par la NASA a démontré que les algues peuvent être produites dans des bioréacteur flottants placés dans les eaux usées des municipalités. Au fil de leur croissance, les algues épurent les eaux usées en absorbant les nutriments. Les algues peuvent ensuite être utilisées pour la production de biocarburants.

Le savais-tu?

Le Conseil national de recherches du Canada a formé un partenariat avec deux entreprises, Pond Tech et St. Mary’s Cement, pour la construction d’une bioraffinerie algale. L’objectif pour Pond Tech est d’utiliser les produits usés issus de St. Mary’s Cement pour cultiver des algues. En retour, ces algues peuvent produire des biocarburants!

Quels sont les inconvénients de l’utilisation des algues pour produire du biodiésel?

La viabilité des biocarburants à base d’algues soulève aussi des préoccupations. Les principales sont les suivantes:

1. La culture des algues en étangs requiert beaucoup d’eau. L’eau s’évapore à la surface de l’étang. Cela signifie qu’il faut constamment ajouter de l’eau. C’est un problème moins important dans les bioraffineries puisque ce sont des systèmes fermés.
2. Les bioréacteurs nécessitent beaucoup d’énergie pour la croissance des algues. L’énergie est utilisée pour assurer la circulation de l’eau, l’apport de lumière et le maintien de la température optimale. Le problème est moindre dans les étangs extérieurs puisque l’énergie lumineuse et thermique provient du Soleil. Mais un apport d’énergie est tout de même nécessaire dans les étangs extérieurs pour assurer la circulation de l’eau.
3. Le bioraffinage est un long processus. Les algues croissent rapidement, mais le processus d’extraction et de raffinage de l’huile qu’elles contiennent est lent. Il est plus long qu’avec d’autres méthodes de production de biocarburants.
4. Le bilan énergétique des biocarburants à base d’algues pourrait être négatif. En d’autres termes, l’énergie nécessaire pour produire les biocarburants à base d’algues serait supérieure à l’énergie qu’ils génèrent!
5. La construction et l’exploitation des installations de production de biocarburants à base d’algues sont très coûteuses. Cela signifie que le prix des biocarburants à base d’algues pourrait être plus élevé que ce que la plupart des gens ou des entreprises sont prêts à payer.

Cependant, certains des avantages des biocarburants à base d’algues pourraient contribuer à pallier ces inconvénients. Notamment, le captage du CO₂ présent dans les émissions industrielles ainsi que l’utilisation d’eaux usées riches en nutriments pourraient favoriser la pleine exploitation du potentiel des algues. 

Des biocarburants à base d’algues autres que le biodiésel

Il existe d’autres façons d’exploiter l’énergie à partir des algues. Par exemple, les algues peuvent être séchées et transformées en « charbon d’algues », qui peut être brûlé avec du charbon fossile dans les centrales électriques. Les algues peuvent aussi être utilisées pour produire des biogaz. Il s’agit d’une technologie qui permet la dégradation de matières organiques comme les algues par l’action des bactéries dans des conditions anaérobies (sans oxygène). Les bactéries produisent des biogaz riches en méthane, lesquels peuvent être brûlés pour générer de l’électricité.

Les biocarburants à base d’algues ne sont pas encore très répandus. Mais si les scientifiques trouvent une façon d’exploiter leur énergie à moindre coût, l’avenir s’annonce vert. Et peut-être même un peu visqueux!