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Rayonnement cosmique et aviation

Avion en vol

Avion en vol (chuckchee, iStockphoto)

Avion en vol

Avion en vol (chuckchee, iStockphoto)

Kim Taylor
8.34

Quels sont les liens avec mon programme d'études?

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Ce document d’information aborde les facteurs qui influencent la quantité de rayonnement cosmique auquel les gens sont exposés durant les vols de longue durée.

Le rayonnement cosmique consiste en des particules de haute énergie provenant de l’espace (le « cosmos ») . Ces particules de haute énergie peuvent provoquer le cancer et endommager les tissus humains. Heureusement pour nous, l’atmosphère et le champ magnétique de la Terre nous protègent contre la majeure partie de ces particules.

La découverte du rayonnement cosmique

Au début de 20e siècle, les scientifiques étaient mystifiés par le niveau de rayonnement ionisant (rayonnement de haute énergie) dans l’atmosphère. Ils ont émis l’hypothèse voulant que si la Terre était la source du rayonnement, alors l’intensité du rayonnement devrait diminuer à mesure que l’on s’éloigne de la Terre. Les premières expériences ont plutôt démontré que le niveau de rayonnement augmentait. Ce mystère a inspiré un jeune scientifique autrichien du nom de Victor Francis Hess à trouver un moyen pour mesurer avec précision le rayonnement dans l’atmosphère.

La première chose qu’Hess décida de faire fut d’augmenter la précision de l’équipement de mesure. À cette époque, les scientifiques commençaient à utiliser un nouvel appareil appelé électromètre permettant de déceler les particules chargées. S’il s’assurait de la précision de son appareil, Hess pourrait se fier aux mesures obtenues.

Ensuite, il devait trouver une façon de s’élever plus haut dans l’atmosphère avec son électromètre. Il y est parvenu à l’aide d’une montgolfière. Entre 1911 et 1913, il s’est envolé à dix occasions avec son ballon de jour comme de nuit. Il a mesuré le rayonnement dans l’atmosphère à une distance pouvant atteindre 5,3 km au-dessus de la Terre.

Victor Francis Hess se préparant à s’élever dans une montgolfière
Victor Francis Hess se préparant à s’élever dans une montgolfière (Source : American Physical Society via Wikimedia Commons).

Hess a découvert que l’intensité du rayonnement diminuait jusqu’à une altitude (distance au-dessus de la Terre) d’environ 1 km. L'altitude est la distance au-dessus de la surface de la planète. Ceci représente à quoi on s’attend si la Terre constitue bien la source du rayonnement. Cependant, le niveau de rayonnement augmente à des altitudes de plus de 1 km. Hess a observé que le rayonnement à 5 km de la Terre correspondait au double du rayonnement au niveau de la mer.

Mais, quelle était la source du rayonnement? Pour établir si le rayonnement provenait du Soleil, Hess s’est envolé dans sa montgolfière par une nuit d’éclipse solaire. Même avec la lune bloquant la majeure partie du rayonnement du Soleil, le niveau de rayonnement grimpait encore en altitude, donnant à penser que le rayonnement provient de l’espace. La découverte du rayonnement « cosmique » a valu à Hess de partager le prix Nobel de physique en 1936.

La relation entre le rayonnement et l’altitude

Comme Hess l’a découvert, il existe un lien entre l’altitude et le niveau de rayonnement. Plus vous montez en altitude, plus vous êtes exposé au rayonnement. Dans un petit aéronef volant à une altitude d’environ 7,5 km (25 000 pi), votre exposition au rayonnement sera 10 fois plus forte qu’au niveau de la mer. À une altitude de 12 km (40 000 pi), soit l’altitude de croisière typique d’un avion de ligne commercial, votre exposition au rayonnement est de 40 à 50 fois plus importante que l’exposition au niveau de la mer.

Données de rayonnement par rapport à l’altitude
Données de rayonnement par rapport à l’altitude recueillies entre mars 2015 et juillet 2018 (Collectées par les élèves de Earth To Sky Calculus en collaboration avec le site Spaceweather.com [avec permission d’utilisation] [en anglais seulement].)

Pourquoi y a-t-il une hausse de l’exposition au rayonnement en haute altitude? Ceci est principalement causé par l’amincissement de l’atmosphère nous séparant des rayons cosmiques. L’atmosphère nous protège, car lorsque les rayons cosmiques frappent les molécules dans l’air, ils se fractionnent en particules plus petites et moins énergétiques. Les particules continuent de se diviser et de perdre de l’énergie en descendant vers la Terre. Donc, sans atmosphère pour nous protéger, les particules des rayons cosmiques pourraient nous frapper avec plus de force!

La relation entre le rayonnement et la latitude

La direction de votre vol — particulièrement votre latitude — a aussi son importance. Les rayons cosmiques frappent la Terre en provenance de toutes les directions, mais notre exposition n’est pas identique partout sur la planète. Ces variations découlent de notre deuxième moyen de défense contre les rayons cosmiques : le champ magnétique terrestre. Le champ magnétique de la Terre agit comme un bouclier pouvant faire dévier certains rayons cosmiques.

En raison de la forme du champ magnétique, la protection est plus efficace à proximité de l’équateur où les rayons frappent le champ magnétique à angle droit (de façon perpendiculaire). 

Illustration par un artiste de la forme et du fonctionnement du champ magnétique terrestre qui nous protège des rayonnements cosmiques dangereux (NASA)
Illustration par un artiste de la forme et du fonctionnement du champ magnétique terrestre qui nous protège des rayonnements cosmiques dangereux (Source : NASA)

Il y a peu ou pas de protection aux pôles où les rayons qui arrivent sont parallèles au champ magnétique. En effet, le niveau de rayonnement cosmique dans les régions polaires est environ deux fois plus élevé qu’à proximité de l’équateur. Les gens qui vivent dans les régions polaires sont protégés contre la plupart des rayons cosmiques par l’atmosphère, mais les personnes qui survolent les pôles en avion sont exposées à un niveau de rayonnement beaucoup plus élevé qu’un vol au-dessus de l’équateur.

La relation entre le rayonnement et l’activité solaire

Le champ magnétique terrestre n’est pas la seule chose pouvant dévier les rayons cosmiques. L’éjection de masse coronale (EMC) peut également repousser les rayons cosmiques qui approchent. Les EMC sont des nuages de gaz assortis d’un champ de force magnétique qui sont expulsés du Soleil pendant des épisodes d’éruption solaire. Ces champs magnétiques peuvent repousser les rayons cosmiques électriquement chargés qui frapperaient autrement la Terre. Cela explique pourquoi davantage de rayons cosmiques atteignent la Terre pendant des périodes d’activité solaire réduite. 

Le savais-tu?

L’activité solaire est mesurée par cycles de 11 ans. Le dernier maxima solaire, la période d’activité maximale du soleil, date de 2014. Le minima solaire est prévu vers la fin de 2019 ou en 2020, les niveaux de rayonnement cosmique devraient alors augmenter.

Les répercussions du rayonnement cosmique pour les passagers et les équipages aériens

La dose d’exposition au rayonnement cosmique en vol varie en fonction de quatre facteurs. Tu connais déjà les trois premiers : l’altitude, la latitude et l’activité solaire. Le quatrième facteur est la durée du temps passé en vol. En règle générale, plus l’altitude et la latitude sont élevées et que la durée du vol est longue, plus l’exposition au rayonnement est importante.

Le savais-tu?

Le millisievert (mSv) est l’unité de mesure utilisée pour déterminer les effets sur la santé du rayonnement ionisant sur le corps.

Tous les gens sur la Terre sont exposés d’une certaine façon au rayonnement cosmique, mais les équipages de longs vols et les grands voyageurs sont exposés à des niveaux beaucoup plus élevés de rayonnement cosmique que l’ensemble de la population.

Par exemple, une étude réalisée par Transports Canada en 2001 a permis de mesurer un rayonnement total maximal de 0,052 mSv pour le trajet Beijing-Vancouver à une altitude moyenne de 11,6 km (35 000 pi) pour un temps de vol total de 10,5 heures (en période d’activité solaire minimale). Ce niveau d’exposition est environ cent fois plus élevé que l’exposition au rayonnement cosmique au sol. 

Le savais-tu?

Le Concorde, un avion de ligne supersonique qui a transporté des passagers de 1976 à 2003, était le seul appareil commercial équipé d’un dosimètre mesurant le rayonnement. Le Concorde volait à une altitude beaucoup plus élevée (18 km ou 60 000 pi) que les autres avions de ligne.

D’après une étude des Centres pour le contrôle et la prévention des maladies, un membre d’équipage aérien est exposé à un rayonnement variant entre 0,2 et 5 mSv par année. Ces niveaux sont semblables ou supérieurs à ceux des travailleurs en médecine nucléaire et dans les centrales nucléaires. Pour cette raison, la Commission Internationale de Protection Radiologique (CIPR) classe les pilotes dans la catégorie des travailleurs sous rayonnements.

Selon les recommandations de la CIPR, l’exposition d’un membre d’équipage d’un avion ne doit pas dépasser plus de 100 mSv en moyenne sur cinq ans. Elle recommande également une exposition inférieure à 1 mSv par année pour le grand public. Ces recommandations ont été adoptées par la Commission canadienne de sûreté nucléaire (CCSN) le 31 mai 2000 en vertu de la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires.

Le savais-tu?

Selon l’Association canadienne de radioprotection, une personne recevrait une dose de rayonnement d’environ 0,03 mSv lors d’un vol entre Toronto et Vancouver, ou inversement.

En raison des risques potentiels pour la santé liés à un haut niveau d’exposition au rayonnement, les organismes de transport nationaux, comme Transports Canada, ont formulé des recommandations pour assurer la sécurité du personnel navigant. Par exemple:

  • Les compagnies aériennes devraient limiter l’affectation de leurs équipages sur les vols :
    • de longue durée;
    • en haute altitude;
    • traversant les pôles.
  • Les membres d’équipage enceintes ne devraient pas voler durant leur premier trimestre.
  • Les compagnies aériennes devraient faire la collecte des données sur le rayonnement provenant des itinéraires de vol, et les utiliser pour prédire le niveau d’exposition auquel sera soumis l’équipage de ces trajectoires.
  • Les compagnies aériennes devraient tenir des registres sur l’exposition cumulative du personnel navigant.
     

En date de 2019, ces mesures demeurent des recommandations et aucun règlement n’existe pour obliger les employeurs à les respecter.

Et finalement, contrairement au personnel navigant, aucune recommandation n’est formulée à l’intention des grands voyageurs susceptibles de voyager parfois autant que certains équipages.

Rayonnement des voyages aériens, Santé Canada
Risques pour la santé des adultes et du fœtus causés par le rayonnement cosmique.
 
Expositions en vol, La radioactivité
Exposition aux rayons cosmiques en vol et dans l’espace.
 
Mesures pour gérer l’exposition au rayonnement cosmique des employés travaillant à bord des aéronefs (2006), Transports Canada
Mesures pour gérer l'exposition au rayonnement cosmique des employés travaillant à bord des aéronefs.

Références

Bagshaw, M., Irvine, D., & Davies, D. M. (1996). Exposure to cosmic radiation of British Airways flying crew on ultra long haul routes. Occupational & Environmental Medicine, 53(7), 495-498. DOI: 10.1136/oem.53.7.495

Calderone, J. (2015, novembre 19). Here's why airline crew members are classified as radiation workers. Business Insider.

Centers for Disease Control and Prevention. (2017, mai  9). Aircrew safety & health.

Finneran, M., & Dunbar, B. (2011, février 18). Thousand-fold rise in polar flights hikes radiation risk. NASA.

Haynes, K. (2018, novembre 19). How would we save the planet from a killer asteroid? Astronomy.

Health Canada. (2004, février 16). Cosmic radiation exposure and air travel.